Hervé
LEQUAY

herve.lequay@lyon.archi.fr



 
“Architecte de formation, développeur par passion, devenu enseignant par la force des choses, je me considère plutôt comme un animateur pédagogique et scientifique.”










Si j’étais un objet je serais... une imprimante 3D à fil chaud




”Elle croise matière tangible et données numériques. Elle fabrique des formes complexes 3D avec un fil. Elle a une qualité que n'ont pas ses consœurs machines-outils : elle se permet souvent des dérapages très personnels, généralement peu désirés par le pilote… mais tellement inspirants. Tout ce que nous imaginons en tant que designers (de vie, de formation, d'architecture, de design, de bricolage) a ce comportement : nous dessinons la réalité, la réalité se tord d'elle-même.













ALT au-delà de l’école





ALT est issu d'une longue histoire, propre à l'ENSAL (selon mon interprétation). D'un côté, Stratégies et Pratiques de l'Architecture, département fondé en 1996 par deux enseignants d'informatique, (le fondateur de Aria et moi), un professeur d'art, un enseignant de projet docteur en sciences de la conception pour l'architecture, et un enseignant de projet chercheur en management de l'innovation. Une équipe à l'opposé des tendances lourdes d'un enseignement de l'architecture basé sur la reproduction du modèle Beaux-Arts et sur une production elle-même très conventionnelle. De l'autre côté, le département Architecture, Développement Durable et Équitable de Balaÿ et Madec, issu de la prise de conscience de la place de l'architecture et de l'urbanisme dans les enjeux environnementaux et sociétaux.

Ces deux départements ont fusionné sous mon impulsion, les stratégies innovantes de SPA devant être mises au service (et nourries réciproquement) d'un développement plus responsable, qui devait faire la part belle à l'esprit critique des étudiants, et admettre l'impossibilité d'un savoir infaillible sur la meilleure manière de faire architecture dans ce monde. 
Sous la direction de Gilles Desevedavy, nous avons proposé avec des enseignants de toutes disciplines de fonder sur ce socle, autour des pratiques non conventionnelles de l'architecture et du cadre de vie, le domaine d'étude ALT.


“Il me semble que notre mode d'enseignement, basé sur la confiance en l'étudiant pour construire lui-même ses savoirs, est difficilement acceptable par nombre d'architectes "purs et durs", qui défendent une vision assez irréelle du rôle des architectes et plus globalement des acteurs du cadre de vie.”


L'architecte, comme l'ingénieur, doivent être capables de s'inscrire et de contribuer autrement dans la transformation de la ville, du territoire, de la société au sens large, y compris en imaginant des architectures bricolées, éphémères, invisibles, immatérielles, insensées, ou en ne faisant plus architecture.”

























Expérimenter pour apprendre





“La créativité en équipe, c'est l'écoute de l'autre, l'empathie, le plaisir partagé de vouloir construire ensemble. Construire, donc aller au-delà de l'idée, et la mettre en danger par l'expérimentation, la fabrication à grandeur réelle, l'approche expérientielle, qui nourrit. Rester dans le projet de papier, c'est prendre le risque de se laisser abuser par son imaginaire, sans éprouver corporellement les choses.


“La recherche est indispensable, ne serait-ce que pour forger un esprit critique. Savoir ce qu'ont fait les autres, s'insérer dans le dialogue pluridisciplinaire, s'enrichir et se confronter par la recherche sont nécessaires. Sans recherche, pas d'adaptation, pas de correction de trajectoire, et on finira dans le mur.

L'expérimentation, le rapport à la matière, à la manipulation, à l'expérience sensorielle, sont nécessaires pour donner corps, éprouver, valider ce que la recherche permet d'imaginer.” 



















Une dernière image...








“Cette image que j'utilise comme avatar pour les visio-conférences (enseignement, instances), provient des premières années du département Stratégies et Pratiques Avancées. Nous demandions aux étudiants de produire des "objets intermédiaires de conception", assemblages de déchets ramassés ici et là, qui nourrissaient les premières étapes de la démarche de projet de notre atelier, à l'instar des pilules chères à Églantine Bigot-Doll.  Cet objet a été bricolé par Yann Pampouille, un de nos étudiants, recroisé 20 ans plus tard grâce à une étudiante de ALT qui l'avait comme tuteur de stage. Collage hétéroclite de haut-parleurs industriels en connexion, il me parle assez bien de notre rôle d'enseignants…”






























La maïeutique comme pédagogie





“Les études supérieures doivent être le lieu d'un apprentissage choisi, en conscience, par le jeune adulte. La formation doit lui donner les clefs pour comprendre le monde, et il doit en retour s'y positionner.
L'autonomie de pensée et la capacité à esquisser un monde meilleur sont les meilleures armes pour corriger un système qui court à sa perte. Cette autonomie et ces capacités s'acquièrent par le plaisir et la volonté, également par une pédagogie qui laisse possible la critique, la divergence, la contre-proposition.

En tant qu'enseignant, je fais collaborer les étudiants à la conception de l'enseignement, à son ajustement aux conditions et au contexte. Je n'ai pas la solution, ni la science infuse, ni la malhonnêteté de croire que je sais. Je n'ai pour moi que ma propre expérience, ma curiosité, mon esprit critique. Et la culture que m'ont donnée des enseignants et chercheurs que j'ai côtoyés. Je veux que les étudiants trouvent le plaisir et la motivation de s'autoformer, sur des sujets qui les passionnent, avec des collègues qui partageront un temps les mêmes projets, et des enseignants et chercheurs qui les stimulent.”

















La force de la pluri-disciplinarité





“TOUTES les disciplines ont toutes le même objet : décrire le monde qui nous entoure pour nous permettre d'interagir avec lui en conscience. Elles développent par contre des approches différentes, des outils et des méthodes spécifiques. Mais elles ont toutes quelque chose à dire sur notre environnement, sur notre cadre de vie.
Or ce cadre de vie se dégrade continuellement, faute d'intelligence et de responsabilité. Dialoguer avec toutes les disciplines est une obligation pour regarder les choses sous tous les angles. Comme en politique : tous les points de vue valent d'être entendus, quand ils ne sont pas de mauvaise foi.
C'est ce qui me conduit aussi à garder un œil critique sur les recherches que nous menons : quelle utilité ?


Comment le regard scientifique et nos actions peuvent contribuer à mieux comprendre, partager, co-transformer le monde ?”







APPI




“Nous avons fondé APPI, à partir du socle décrit plus haut, il y a 10 ans maintenant : par la volonté de former les étudiants au management de l'innovation et du projet, par la confrontation à des contextes réels (avec un monde extérieur souvent violent), par la collaboration avec des scientifiques, des acteurs économiques, sur des enjeux présents ou à venir. Et souvent sur des sujets hors du champ direct de l'architecture. La compréhension des mécaniques du système capitalistique dans lequel nous évoluons fait partie des cadres de projet que nous proposons.”


















ALT au futur - un futur collectif ?




“Savoir ce que deviennent les étudiants une fois sortie de ALT (agence, entreprise, enseignement, recherche, milieu associatif, etc.) serait intéressant pour évaluer la portée de nos enseignements. Imaginer une construction pédagogique comme ALT, c'est plaisant, en tant qu'enseignant. Élaborer son propre parcours, c'est plaisant, en tant qu'étudiant.

Mais à quoi bon construire et défendre ce modèle si c'est pour ne rien offrir d'autre que se couler dans le moule conformiste des architectes classiques, une fois la porte de l'école franchie ?


Il faut donc conserver un lien entre les anciens diplômés, qui puissent alimenter le domaine d'étude de leur expérience, de sujets potentiels de projet, de recherche, d'action, de partenaires, et qui puissent également participer à l'accompagnement.

Un collectif permettrait de faire vivre cet esprit de partage, d'altérité. Il en est déjà un, peu dynamique certes : la société des alumni. Les anciens de ALT devraient y participer, la nourrir, l'animer, et porter à l'extérieur leur ALTitude.


Une production des étudiants de Master 2 - ALT 20.21