Marie-Hélène FABRE

marie-helene@lyon.archi.fr






 















Vision de l’enseignant



Dans ALT, les enseignants ne sont pas présents pour enseigner une pratique de projet comme celle effectuée en agence : Une école ce n’est pas une reproduction du monde professionnel. L’enseignement est construit de manière à  apprendre aux élèves à réfléchir par eux-même,  et à savoir ensuite  trouver les ressources dont ils auraient besoin  pour mener à bien leurs projets. Ce qui est important c’est aussi d’apprendre aux étudiants à explorer, à se poser des questions, à prende des risques, à aller là où on n’irait pas naturellement. 



“Quelque soit l’échelle et la forme, le monde a besoin d’inventions, le monde a besoin de folie, le monde a besoin de beauté.”



Parce que de toute façon le monde dans lequel on vit est très normé, et en tant qu’architecte, en tant que personne de la création, même si un architecte n’est pas un artiste, il a quand même une velléité créatrice. Et ça n’empêche pas qu'ensuite on puisse être capable de construire un bâtiment qui tienne debout et qui soit HQE, RT 2012, RT 2020 etc...


On arrive toujours à trouver des solutions pour entrer dans les cases mais si on n’est pas capables de penser au-delà des cases alors on perd toute diversité. La façon dont on enseigne l’architecture est déterminante sur la façon dont on la pratique après. C’est pour ça que les études d’architecture sont des études longues, en 5 ans. Moi quand j’ai quitté l'École Spéciale d’Architecture, il y avait une tendance qui était à la fois une demande des élèves et une tendance de certains enseignants et du monde professionnel, à vouloir des études de plus en plus pragmatiques.
D’une part, il y avait les élèves qui avaient des envie de construction à l'échelle 1 avec l’envie de se confronter à une matérialité tangible. D’autre part, il y avait et il y a toujours un contexte de crise économique qui fait un peu peur, donc je pense qu’il y a des étudiants qui se disaient, « c’est bien d’avoir cette expérience de construction à échelle 1, parce que finalement tout ce qu’on fait ça reste assez théorique, un peu rêveur ». Et puis c’est aussi lié à l'émergence d’une pratique de l’architecture autre, que ce soit à travers des structures telles que Bellastock ou Encore heureux.





Folle architecture



Il y a un rapport à la folie et à la création que je trouve très important à maintenir en architecture. Quand je parle de folie, c’est dans le sens d’oser faire des choses qu’on ne pourra pas faire après dans le monde professionnel. C’est comme quand on lit un roman qui propose des dérives incroyables, qui nous emmène dans des mondes incroyables: on s’en délecte, mais ce n’est pas  pour autant qu’on voudrait en faire une réalité. Cela permet de s’échapper et  de penser des choses autrement, et après de revenir dans le concret en étant capable de proposer des choses différentes. C’est dans ce sens-là que je parle de folie.





Intervenante et enseignante ALT
Interview du 11.02.21














Alt et l’autonomie 


J’apprécie ce côté de mise en autonomie des étudiants dans le dem ALT, et donc le fait que les étudiants soient responsabilisés, qu’on leur donne les moyens ou la possibilité de se prendre en main. Quand on sort avec un master en poche, et qu’on se confronte au milieu professionnel, un certain degré d’autonomie est attendu, et c’est une compétence difficile à développer dans le cadre classique d’études. 

L’autre côté du DEM ALT c’est que jusqu’à présent, il y avait des diplômes très différents, c’est pas tant la question des sujets différents, je dirais que c’est plus la question peut-être de l’approche, d’un niveau d’exigences, c’est un peu difficile à qualifier… Je pense que le DEM ALT gagnerait à trouver une forme de cohérence un peu plus importante que la forme qu’il a actuellement, notamment dans le type de démarche, dans des attendus plus clairement énoncés.  Peut-être que sans avoir de thème commun il y a des axes de recherche communs, d’autant que la recherche et de plus en plus présente dans le champ master. Pour moi, il y a quelque chose à travailler de cet ordre-là.



“J’ai déjà assisté à des jurys de DEM ALT avec des projets qui étaient présentés de manière un peu classiques, d’autres de manière un peu performatives, d’autres avec une approche plus artistique, et ça c’est une richesse qu’il faut pas perdre pour moi, c’est très fort. Dans le paysage de l’école d’architecture de Lyon c’est peut-être ça aussi qui distingue le DEM ALT des autres domaines d’étude.

“Comme pour un catalogue raisonné, il faudrait que ALT soit un espace de liberté raisonnée.” 






Le rôle politique de l’architecte



 Et il y a le rôle politique de l’architecte, et je trouve que ce rôle-là se perd dans les études d’architecture. Ces dernières années, dans ce que j’ai pu observer dans certaines écoles, ou quand j’étais à l’école spéciale, dans des jurys, l’aspect poliltique propre à l’architecte se perd un peu au profit de l’aspect plus technique, concret, raisonnable, sérieux… L’architecte ce n’est plus un artiste, il sait construire, il sait faire tenir ses bâtiments, il sait respecter les normes, et puis l’environnement, la sécurité incendie… tout ça. Je simplifie un peu volontairement mais c’est mon ressenti de ce que j’observe depuis quelques années.



Que faire après ALT? 



C’est difficile parce que les choses sont très complexes. J’ai envie de dire autant que faire se peut, aller au maximum dans les directions qui nous intéressent, que ce soit en sollicitant les agences qui nous intéressent, peut-être en développant en parallèle un travail personnel… D ‘une certaine manière de ne pas baisser les bras. Je dis ça mais après il y a la réalité… En fait, il faut de l’acharnement. Alors peut-être que pendant un an, deux ans on va décider d’aller dans une agence où on sait que ça tourne et tout ça, mais si on le fait en étant conscient et en réfléchissant à l’après. Je ne veux pas donner une vision idéaliste du quand on veut, on peut, c’est pas ça le truc, mais si on a vraiment envie il faut s’acharner, et puis développer des stratégies pour pouvoir s’acharner. Et à chacun de trouver sa stratégie. Une fois que j’ai dit ça, ça n’aide pas beaucoup, mais c’est le conseil que je peux donner si c’est perçu comme un conseil.






















“Comme pour un catalogue raisonné, il faudrait que ALT soit un espace de liberté raisonnée.”
Une production des étudiants de Master 2 - ALT 20.21